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Note d’intention

jeudi 27 avril 2017, par Valentin.

Voici une brève note d’intention que j’ai rédigée pour présenter en quelques mots la partition que j’ai écrite pour les « Musicien(ne)s en herbe » 2017.

Lorsque Claude Lherminier m’a proposé, fin 2016, d’écrire une partition sur le thème de la chanson Cadet Rousselle, j’ai tout de suite pensé au compositeur Albert Roussel (1869-1937), ainsi qu’à l’écrivain Raymond Roussel (1877-1933). Ces deux personnages historiques, qui ne se sont jamais côtoyés malgré leur homonymie fortuite, partageaient pourtant une passion envers les mathématiques et la logique. Il faut leur ajouter un troisième Roussel, moins connu mais tout aussi essentiel dans ce même domaine : Yves Roussel (1938-2009), fondateur du Petit Archimède, une revue de mathématique destinée au jeune public qui a ouvert la voie à plusieurs générations de passionnés et de presse vulgarisatrice, de Pour la Science à Tangentes en passant par Science&Vie Junior et le Kangourou des mathématiques ; tout un univers dans lequel j’ai moi-même grandi.

Impossible d’ignorer autant de coïncidences : je décidai donc que cette partition sur l’air de Cadet Rousselle, serait aussi une partition mathématique. Elle est ainsi découpée en trois mouvements, qui correspondent chacun aux trois segments de la chanson de départ et déploient chacun différents procédés d’écriture sous contrainte :

  • Le premier mouvement est entièrement construit à partir de certaines décimales du nombre π, converties en notes au moyen de différentes stratégies (quantité de notes, degrés,…). On reconnaîtra sans mal les premières décimales bien connues (en base 10) : 3, 1, 4, 1, 5, etc. ; cependant il m’a aussi fallu aller un peu plus loin pour trouver dans ces décimales (plusieurs milliards de chiffres après la virgule) les séquences exactes qui reproduisent la mélodie de Cadet Rousselle ! Des parties facultatives, pour les instrumentistes plus avancé(e)s, donnent également à entendre le contexte dans lequel ces séquences apparaissent (c’est-à-dire les chiffres-notes qui les précèdent et les suivent).
  • Le deuxième mouvement est un palindrome rigoureux : toutes les notes (hauteurs, rythmes et nuances) de la première moitié de la partition sont données à nouveau, en sens inverse, pour en former la deuxième moitié (le silence du milieu tenant lieu d’axe de symétrie). Ce mouvement est construit sur la deuxième phrase de Cadet Rousselle, réharmonisée d’une façon peu habituelle ; en tendant l’oreille l’on pourra également reconnaître un air associé à la chanson de Jehan de Nivelle, l’ancêtre de Cadet Rousselle dont on retrouve la trace jusqu’au XVe siècle.
  • Le troisième mouvement s’intéresse à un objet mathématique exotique et intrigant : le système de numération phinaire, c’est-à-dire la base construite à partir du nombre φ (le nombre d’or). Cette base fut décrite et explorée pour la première fois dans les années 1950 par un jeune mathématicien (âgé de 12 ans à l’époque !). Grâce à cette base, il proposa notamment une manière inédite d’écrire le nombre π, avec des 1 entrecoupés de un ou plusieurs 0, ce dont je me sers ici pour évoquer les « éclats de rire » à la fin de la chanson Cadet Rousselle. Cette succession irrégulière donne lieu à diverses superpositions rythmiques, avant de s’installer progressivement dans un mouvement ternaire pour finir par un dernier petit gag.

J’espère ainsi avoir pu faire de cette partition un objet ludique et prêtant à réfléchir, une sorte de jeu de piste musical et mathématique offrant à ses jeunes interprètes (ou, pourquoi pas, moins jeunes) plusieurs niveaux de lecture…

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